Plaisir d'écrire

Assis là, sur le même tabouret, du même bar, chaque jour de chaque semaine. Assis seul dans un coin du bar sur son tabouret, une bière à la main. Le regard perdu, la tête baissée, il boit et se tait. Personne ne fait attention à lui, il fait partie des meubles à présent. Chaque soir, en sortant du travail, c'est la même routine. Il ne prend pas le temps de rentrer chez lui, le bar est devenu avec le temps sa deuxième maison, oui, un peu comme sa maison du bonheur. C'est un homme seul, triste, sans amis, ni famille. Son visage est marqué par ce manque de chaleur humaine, sa bière remplit ce manque, soigne ses blessures. Cet élixir entre dans sa bouche, transperce tout son corps, cours dans ses veines, jusqu'à brouiller son cerveau. Elle lui donne un court instant de joie, d'oubli, jusqu'à l'abandonner et le faire retourner à la réalité. La bière le fait vivre, mais le tue à petit feu. Ce n'est pas quelqu'un de joyeux, son visage en est la preuve. Une peau flasque, ridée par l'alcool, une bouche tournée vers le bas, synonyme de tristesse et de mécontentement. Il ne parle pas, le liquide l'en empêche. Elle le coupe du monde entier, et lui retire la parole en le noyant de son nectar. Il pense que c'est la bonne chose à faire, continuer à avaler, au lieu de résister. Il a baissé les bras, sa posture en est la signification, le dos courbé, les épaules baissées, à demi-affaler sur le comptoir, il ne fait que boire. Il se laisse aller de jour en jour. Son costume de travail se dégrade avec lui, les cheveux ébouriffés, une barbe mal rasée, tout cela n'a plus d'importance pour lui, ce ne sont que des banalités.  Je n'ai jamais compris qu'est ce qui avait provoqué son renfermement sur lui-même. Au début, j'ai voulu comprendre, communiquer, mais il ne répondait à aucune de mes questions. Il ne parlait que pour prendre commande. Et je n'avais que d'autres choix que de satisfaire mon client.

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®© -Marie